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Interview : Julien Corre, programmateur de l’Elektric Park

Publié le 24 mai 2024

Julien Corre nous dit tout sur la programmation 2024 du festival électro de retour le 15 juin prochain.

Initialement prévu les 30 et 31 août, c’est finalement sur une date unique le samedi 15 juin que se tiendra l’Elektric Park version 2024. Un changement de date forcé par le contexte olympique mais qui n’a pas empêché les équipes du festival d’imaginer une édition à la hauteur de leurs espérances. Cette année encore, l’Ile des Impressionnistes à Chatou vibrera ainsi au son des musiques électroniques avec une programmation éclectique où se côtoient Vladimir Cauchemar, Mandragora, Miss K8 ou le collectif La Darude. Julien Corre, programmateur de l’évènement, revient pour nous sur son rôle au sein de l’équipe de l’Elektric Park et détaille le programme des festivités qui attendent les festivaliers cette année.

Est-ce que tu pourrais décrire ton rôle en tant que programmateur pour l’Elektric Park ?

Mon rôle est assez simple : remplir des cases vides de programmation. On a plusieurs scènes à l’Elektric Park qui font la part belle à différents styles. Une Mainstage plus house/EDM mais qu’on a tendance à aller durcir en closing, une Red Stage dédiée aux musiques hard, etc. Et donc même si on a l’habitude de retrouver certaines stages d’une année à l’autre, d’autant plus que c’est la quatorzième édition du festival, le métier de programmateur va aussi consister à savoir sous quel format on travaille ces stages. L’Elektric Park ça reste un festival 100% musiques électroniques mais il y a tellement de branches et de sous-styles que chaque année on teste de nouvelles choses. Et puis c’est une scène très vivante, elle évolue chaque année donc il faut aussi essayer de suivre et comprendre. Concrètement, on commence par établir une whislist et après on va regarder les dispos, les tarifs, etc. et on entre dans une phase de négociation.

En parlant de tarifs, on entend beaucoup parler d’une explosion du cachet des artistes ces dernières années. J’imagine que c’est quelque chose qui a un impact direct sur ton travail. Est-ce que cela t’oblige à dans une certaine mesure délaisser les grosses têtes d’affiche internationales pour se recentrer sur les artistes locaux ?

La partie budgétaire est un point essentiel du rôle de programmateur. Globalement il y a une inflation importante des cachets des artistes, principalement des artistes internationaux. En gros, on tend vers un petit groupe d’artistes qui jouent partout et pour de plus en plus cher. Donc c’est aussi notre rôle en tant que programmateur de s’implanter localement. Déjà parce que c’est une valeur importante pour nous et on a ce souhait de défendre la scène française. Mais aussi parce que certains très très gros artistes deviennent intouchables. Il va y avoir des méga têtes d’affiche dont le cachet représente à lui-seul l’ensemble de mon budget programmation. A nous donc de chercher les talents à venir, de fidéliser certains artistes et de savoir faire des coups de programmation etc. Pour cela je ne suis pas tout seul puisque qu’à l’Elektric Park on a un comité de programmation et on bosse aussi sur chaque stage avec différents crews. Par exemple pour la scène hard on travaille avec Hardcore France pour nous conseiller au mieux.

Combien de temps te prend ce travail de programmation ? Est-ce qu’à peine le festival fini tu réfléchis déjà à l’édition suivante ?

Oui c’est direct. Même là, on est déjà en train de réfléchir aux têtes d’affiche pour l’été 2025. Le souci que l’on peut avoir avec Elektric Park d’habitude c’est le lieu et la date : le dernier week-end avant la reprise des cours. On arrive après tous les gros festivals parisiens, tous les Peacock, We Love Green, Marvelous, Lollapalooza ou même Rock en Seine dans une autre mesure. Il y a donc tout un travail un peu compliqué d’exclu à Paris et le plus tôt on s’y prend, mieux c’est. L’objectif en général c’est qu’avant la fin de l’année on ait bouclé les trois quarts du line-up pour l’année suivante. Tout en se laissant toujours une petite marge de sécurité pour pouvoir se positionner jusqu’à tard parce qu’il y a toujours des trucs qui changent au dernier moment, etc.

En parlant de changement de dernière minute, en raison du contexte olympique vous avez été contraints d’avancer votre édition 2024 initialement prévue les 30 et 31 août au 15 juin. Est-ce que tu peux revenir pour nous sur ce qui a motivé ce changement de date ?

Je vais manquer de détails administratifs mais on a eu le feu vert l’été dernier pour nos dates de 2024 sur le 30 et 31 août. L’Ile des Impressionnistes c’est un lieu sur lequel on est implanté depuis un certain temps maintenant donc on travaille vraiment main dans la main avec la mairie et le département. Tout était ok, j’avais même quasiment fini ma programmation au 31 décembre. Dans les premières semaines de janvier, on nous a annoncé qu’il y avait eu une extension de la loi olympique qui partait du 1er juillet au 15 septembre et que l’autorité de la totalité de la région Ile de France revenait au préfet de Paris sur cette période. Nos dates tombant en plein dans les Jeux Paralympiques, le préfet de Paris n’a pas voulu se compliquer la vie en termes d’organisation et a préféré les annuler. En travaillant avec les équipes de la mairie et du département on a réussi à trouver une autre date qui nous avançaient de trois mois sur une date unique le 15 juin. Forcément il a fallu repenser la programmation, ça nous laisse moins de temps pour vendre les billets, pour raconter une histoire mais on a pris le pari.

Comment justement tu as retravaillé ta programmation ?

J’ai pu reporter une dizaine d’artistes sur les 50, 60 que j’avais programmés. Malheureusement beaucoup de gens n’étaient pas disponibles au 15 juin qui est une période forte en Europe et dans le monde. On a du aussi adapter nos scènes. Par exemple on n’aura pas notre Blue Stage habituellement dédiée à la bass music. Avec ce changement de date, on s’est retrouvé proche de pas mal d’évènements consacrés à ce genre donc on n’aurait pas eu la programmation artistique que l’on voulait. Et puis on ne voulait pas forcément se mettre en concurrence avec ces autres évènements qui pour la plupart sont des amis. On a donc préféré s’associer avec le festival OHLALA qui a lieu le week-end juste avant et on conseille à notre public d’y aller. Mais voilà, on a mis les bouchées doubles pour finir le line-up et avoir quelque chose qui ressemble à la vision que l’on souhaitait. Et au final, on en est content et le public réagit bien. Donc on verra le 15 juin mais pour l’instant le pari est réussi.

Justement, on peut commencer à entrer un peu plus dans cette programmation 2024. A l’image de la Yellow Stage, l’une des forces de l’Elektric Park est son éclectisme. Comment tu arrives à faire cohabiter autant de styles différents sur une même festival ?

On essaie de mettre des couleurs par scène. Il y a aussi des choses qui fonctionnent et qui sont attendues par le public comme la partie hard music dont on augmente justement le budget parce qu’il y a cette attente et aussi des artistes géniaux qui méritent d’y jouer. La Yellow est naturellement plus ouverte, même si là sur cette édition on a eu tendance à aller vers des choses qui tapent un peu plus avec des Jacidorex, Mandragora ou Vladimir Cauchemar. La chance que l’on a avec l’Elektric Park et notre public c’est que ça se mélange à fond. Là où sur d’autres évènements ça peut être compliqué de mélanger des gens qui écoutent de la drum’n’bass, du hardcore et de l’EDM, ici ça se balade beaucoup et les publics sont très respectueux.

Sur cette Yellow Stage il sera possible de retrouver pas mal d’habitués du festival.

C’est vrai que côté tête d’affiche cette année on a fait la part belle à des parrains de la franchise Elektric Park. On aura par exemple le show Anthropology III de Vladimir Cauchemar ou encore le nouveau live de Mandragora. Mais la même scène il y aura aussi le b2b entre Asdek et Ava Mind qui est un peu l’une des sensations cette année, un autre b2b très cool entre Mara et Bianca Oblivion ou encore Mezerg qui sera avec nous avant de jouer au Zénith de Paris en 2025. Sans oublier également l’une des premières dates en France de Venjent, un producteur drum’n’bass totalement hybride qui commence à bien buzzer.

Il y a aussi un joli programme qui attend les passionnés de hard music du côté de la Red Stage.

Oui on a notamment le premier b2b entre Miss K8 et Act of Rage, je pense que ça va faire mal (rires). On accueille aussi pour la première fois le b2b entre Barber et Soulblast en closing de cette Red Stage et on aura toujours nos fidèles comme Damien RK ou Neko qui font partie de la team Hardcore France et qui font toujours la différence sur ces stages.

Est-ce que tu peux aussi nous parler de la Black Stage avec, nouveauté de ce cru 2024, sa scène à 360° et sa programmation confiée à La Darude ?

J’attends beaucoup de voir l’énergie que l’on va avoir sur cette scène. Avant c’était une stage classique positionnée en sous-bois quoi fonctionnait très bien. Là cette année on l’a fait évoluer sur un format à 360° et avec une carte blanche confiée à La Darude. Forcément le format 360 c’est quelque chose qui parle beaucoup au public et même des têtes d’affiche comme Amélie Lens ou Four Tet s’en sont emparés lors de leurs Zénith. Donc là on aura un 360° dans un sous-bois avec 1000-1500 personnes autour du collectif La Darude avec toute la crème du crew. Et j’avoue je pense que je vais passer beaucoup de temps autour de cette scène (rires).

L’une des forces du festival est sa capacité à proposer chaque année de nombreux b2b inédits. Comment tout cela se met en place ?

C’est complétement open. Sur la Yellow Stage on arrive souvent avec quelques idées derrière la tête et on propose ça aux agents et managements. Mais souvent on leur laisse carte blanche et on leur laisse complètement faire. C’est d’autant plus le cas sur la Red Stage où on a la chance de bosser avec Hardcore France qui ont toujours plein d’idées et sont proches des artistes donc ça va encore plus vite. La plupart du temps ça se fait très naturellement et on essaie toujours d’avoir un, deux ou trois b2b complétement en exclusivité. Cette année ce sera donc le Miss K8 b2b Act of Rage qui sera une première mondiale.

J’imagine qu’en tant que programmateur tu as dans un coin de ta tête une liste rêvée d’artistes que tu aimerais faire jouer à l’Elektric Park.

Oui bien sûr. On va tous regarder du côté des très grosses têtes d’affiche totalement intouchables pour notre économie. On peut en parler maintenant, on a longtemps essayé cette année sur Skrillex par exemple. Il avait annoncé à tous les festivals qu’il tournerait sur cette période donc nous on a été à fond dedans. Finalement, il a fait marche arrière et a préféré se tourner vers des festivals plus coups de cœur. Il a fait les Nuits Sonores par exemple, le Rex Club et là il y a Peacock qui ont eu la chance de l’avoir – aussi parce qu’ils ont une histoire ensemble. Donc oui si je devais choisir un nom, typiquement Skrillex cette année ça aurait été le rendez-vous parfait. On avait même imaginé lui confier une carte blanche sur la Mainstage où il aurait pu en faire ce qu’il voulait en termes de scéno, programmation, etc. Mais qu’on soit bien d’accord, ça c’est ce que l’on avait imaginé dans le cadre où on était encore sur le format à deux jours et où on lui aurait confié le vendredi. Je ne veux pas que les gens pensent qu’on a fait une programmation au rabais ou par dépit. On est très content de notre line-up actuel et on a vraiment réussi à programmer quasiment tout ce qu’on avait imaginé de base sur le samedi.

Est-ce qu’un retour au format sur deux jours est déjà prévu pour 2025 ?

C’est une discussion qui va avoir lieu. Il n’y a pas de contre-indication pour revenir à deux jours mais à voir aussi le succès de ce format en juin.

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