Chaque été, la sortie de « RAW Summer Hits » est devenue un rituel attendu par les amateurs de beats moites, de kicks lourds et de rêveries électroniques à ciel ouvert. Pour cette sixième édition, le label parisien RAW mise sur une formule bien rodée : 25 morceaux « taillés pour l’été », oscillant entre groove hypnotique, house vocale, techno légère et dérives trance. Une tracklist généreuse, où se côtoient figures confirmées et artistes en ascension. Reste à savoir si cette compilation parvient à conjuguer efficacité estivale et fraîcheur artistique. Spoiler : c’est réussi, mais pas renversant.
Dès les premières minutes, « In My Mind » de Janis Zielinski donne le ton. Subtile, progressive, mélodique : la production est soignée, sans jamais forcer le trait. On n’est pas dans l’uppercut rave, mais dans l’évocation d’un été flottant, entre souvenirs de warehouse et chill d’après-midi. Cette tension douce traverse toute la compilation : entre les BPM maîtrisés de DJ Physical avec « Closer 2 Me » et la trance propre et linéaire de Trudge pour « I Followed You (Through Doors) », « RAW Summer Hits 6 » privilégie l’écoute souple à la violence des kicks.
Les formats varient intelligemment. Il y a des bombes prêtes à faire trembler les open airs (Bad Boombox & Ollie Lishman – « BE SERIOUS », imparable), des morceaux introspectifs (MCYL & BURY2K – « Always Love U »), quelques incursions plus trap ou UK-influenced (2HOT2PLAY & Armin Hermann – « Foot on the Gas »), et des tentatives pop-electro réussies (Mija & Jacob Grosse – « Turn It Up »).
Le morceau de La La – « Get Up », porté par une ligne vocale bien sentie et un groove old-school, rappelle ce que cette compilation pourrait incarner : un espace pour faire dialoguer la fête d’hier et celle d’aujourd’hui.
Mais si la direction artistique est cohérente, elle pèche parfois par excès de prudence. « RAW Summer Hits 6 » ne prend que peu de risques, et certaines pistes, bien que techniquement irréprochables, finissent par se fondre dans une ambiance globale trop homogène. On attendait plus de relief, plus d’accidents heureux, plus de tension. Certaines signatures RAW plus radicales ou abrasives sont absentes ici : pas de vraie surprise acid, peu de breaks inattendus, et une écriture souvent linéaire.
Danny Wabbit – « Kebab Shop Date » ou AISHA – « Mumbai Strip 2002 » sortent un peu du cadre par leur ton plus espiègle ou brut, mais restent isolés. On aurait aimé que le label, habitué à flirter avec des scènes plus dures (gabber, techno industrielle), ose une vraie fracture sonore dans cette compilation.
L’une des grandes réussites du projet réside néanmoins dans son casting équilibré. Le label réussit le pari de mêler des artistes installés (Justin Jay, Grand V, Leo Pol) à une scène montante bien suivie sur SoundCloud ou Bandcamp. C’est là que RAW excelle : proposer une photographie crédible, contemporaine, de la musique électronique accessible mais exigeante. Les amateurs de diggers comme les habitué·es des grands festivals s’y retrouvent.
« RAW Summer Hits 6 » est une compilation largement aboutie, fluide, techniquement irréprochable. Elle s’écoute comme une bande-son bien produite de l’été 2025 : idéale pour les trajets en voiture, les apéros prolongés ou les fins de soirées tranquilles. Mais elle laisse un petit goût d’inachevé : on aurait aimé être bien plus bousculé, emporté, ébloui. À force de viser juste, RAW tape un peu trop au centre. L’été n’en sera pas moins beau, mais il manque ce grain de sable qui pourrait faire de cette série autre chose qu’un rendez-vous agréable. Un rendez-vous inoubliable.
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